A qui est ce terrain ? A moi !

A qui est ce terrain ? A moi !

Peut-on devenir propriétaire d’un terrain, d’un chemin, d’un local dans une copropriété sans être obligé de l’acheter ? Peut-on être de mauvaise foi, savoir que l’on n’est pas le véritable propriétaire mais être en droit de réclamer la propriété du bien ?

Patience et longueur de temps ont donné raison à plus d’un heureux voisin !

Je lisais hier dans le journal à la rubrique « annonces légales » ce petit texte remanié :

Prescription trentenaire

avis d’enquête

Le notaire, Maître Debonnefoi est chargé de l’établissement d’un acte constatant la prescription trentenaire au profit de Monsieur Jean-Marc Monterrain, portant sur la parcelle cadastrée section BD N° 1021 d’une contenance de 1234 m².

Dans le cadre de l’enquête préalable à l’établissement de la prescription trentenaire, le public est avisé que toute personne intéressée dispose d’un délai d’un mois à compter du jour de la présente publication pour s’y opposer. Les oppositions sont recevables qu’autant qu’il est justifié de titres de propriété réguliers publiés au service de la publicité foncière compétente. Elles devront être faites aux jours ouvrables à l’étude de Maître Debonnefoi.

Dans le jargon juridique, on parle de :

Prescription trentenaire : les conditions à remplir

La possession se suffit à elle-même

« Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. »

Jean-Marc Monterrain est voisin du terrain qu’il convoite depuis trente ans maintenant. Il a saisi le notaire pour en devenir propriétaire par le biais de la prescription trentenaire. Il doit pouvoir prouver :

  1. Une possession continue : Cela suppose que Jean-Marc soit resté voisin du terrain de manière continue, et qu’il n’ait pas été muté aux quatre coins de la France durant ces trente années.
  2. Une possession ininterrompue : Si Jean-Marc a été privé pendant plus d’un an de la jouissance du terrain : des campeurs sédentarisés ont installé leur mobil-home sur le terrain et ne veulent plus partir. La possession de Jean-Marc a été interrompue, la condition n’est pas remplie.
  3. Une possession paisible : Si Jean-Marc a clôturé le terrain par des barbelés électrifiés, et posé des panneaux « danger de mort » aux quatre coins du terrain. La condition n’est pas remplie…
  4. Une possession publique : Si Jean-Marc dissimule les actes matériels de possession sur le terrain aux personnes qui auraient intérêt à le connaître : Il tond la pelouse la nuit avec une tondeuse silencieuse, et profite de la pleine lune pour s’occuper du potager. La condition n’est pas remplie.
  5. Une possession non équivoque : Jean-Marc doit avoir manifesté sans ambiguïté son intention de se comporter comme propriétaire. Si Jean-Marc a semé le doute dans l’esprit des voisins en évoquant son oncle d’Amérique, propriétaire du terrain. La condition n’est pas remplie.

Un délai de trente ans pour un possesseur de mauvaise foi

Etre de mauvaise foi n’est pas une attaque personnelle contre Jean-Marc ! 😉

Cela veut simplement dire que Jean-Marc sait qu’il n’est pas le véritable propriétaire du terrain puisqu’il  ne dispose pas de titre de propriété.

Toutefois, cela ne lui interdit pas de :

  • revendiquer la possession du terrain suite à l’expiration d’un délai de trente ans aux conditions vues ci-dessus et
  • d’obtenir la propriété du terrain.

La mauvaise foi paie en la matière !

Pour un terrain d’une valeur de 100 000 euros, on peut sauf erreur estimer les frais à payer par Jean-Marc à environ 1 000 euros :

  • Rémunération du notaire (faible)
  • Formalités effectuées par le notaire (faible)
  • Taxe de publicité foncière (0,715 % de la valeur du terrain) soit 715 euros
  • Contribution de sécurité immobilière (ex salaire du conservateur des hypothèques de 0,10 %) soit 100 euros.

Jean-Marc a ainsi sollicité du notaire qu’il constate la prescription acquisitive trentenaire et qu’il établisse son acte de notoriété acquisitive.

Compte tenu du montant des frais de procédure, on peut dire que c’est cadeau ! 🙂


Sources : articles 2258, 2261, 2271 du Code civil.


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5 réflexions sur “A qui est ce terrain ? A moi !”

  1. Bonjour, propriétaire d’un terrain de 600 m2 sur une parcelle de 1200m2 divisé en deux. Je voudrais borné ma partie et la délimitée. Seul problème la parcelle entière est cultivée par un paysan que je ne connais pas. Je pense qu’il va faire-valoir son droit d’usurpation et de propriétaire légitime car il l’entretient et non moi. Quels conditions doivent être appliqués pour revendiquer mes droits sur cette terre.
    Merci de votre aide.

  2. Bonjour ,
    L ‘année prochaine , en Février2022 , cela fera 30 ans que nous avons acheté une résidence secondaire , dans l ‘arrière pays niçois.
    Il s ‘agit d ‘une petite( 35 m2) et modeste maison de village ( anciennement grange restaurée).
    Devant cette maison , se trouve une petite cour de 20 m2 environ( où l ‘on battait le blé au début du siècle, aux dires des « anciens du village  » qui ne nous appartient pas , mais appartient, en indivis , avec une vieille grange à l ‘abandon et attenante au terrain , à deux frères depuis le décès de leur mère il y a sept ans environ .
    La succession à ce jour n ‘a pas eu lieu car mésentente des deux frères et ne semble pas être régularisée un jour ( important patrimoine immobilier qui ne vaut pas grand chose là où il se trouve…)
    Quant à nous , nous profitons de cette RS dès que nous le pouvons , l ‘été en week-ends prolongés , l ‘automne , pour les champignons et dès que nous le pouvons … Nous profitons également du jardinet (de la cour ), selon la saison où nous y installons table , parasol , chaises longues. Nous avons aménagé , fleuri le jardin et avons même planté des arbustes , lesquels , au fil des ans , ont pris de l ‘ampleur et forment à ce jour , une clôture naturelle.
    En 2022 , cela fera donc 30 ans que nous profitons de cette maisonnette et de son jardinet.
    Personne , à savoir les héritiers , nous a interpellé durant toutes ces années ; nous ne les avons d ‘ailleurs jamais vu.
    Pourrons – nous , l ‘année prochaine , entreprendre des démarches afin de prétendre à la prescription trentenaire de cette petite cour ? comment nous y prendre ? aurons-nous des chances d ‘y parvenir? si cela devait être le parcours du combatant , d ‘avance ,nous y renoncerions car nous avançons dans l ‘âge.
    Nous avons omis un détail peut-être important pour la réponse : aucune servitude de passage sur cette cour n ‘est précisée dans l ‘acte authentique d ‘achat …pourtant il y a toujours eu une porte fenêtre ouverte sur la dite cour…
    Demeurant dans l ‘attente de vos conseils
    Bien cordialement

    1. Bonjour,

      Il semble que les règles de la prescription trentenaire vous soient applicables. A confirmer auprès d’un notaire. La prescription acquisitive est un moyen d’acquérir sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre un bien par l’effet de la possession (article 2258 du code civil).

  3. Bonjour Jasmine,
    Je vous remercie beaucoup pour les exemples bien claires que vous nous avez donné sur la prescription trentenaire !
    Seulement, j’ai une question sur la possession non équivoque : Nous occupons une parcelle depuis 36 ans. Nous pouvons prouvé la possession continue, paisible, ininterrompue et publique. Par contre, désireux de devenir propriétaire légalement, nous avons demandé son achat à l’état qui a refusé sous le seul prétexte que la parcelle est en zone naturelle.
    Pouvons-nous faire quand même la démarche de la prescription trentenaire auprès d’un notaire ?
    Nous vous remercions par avance pour votre réponse.

    1. Bonjour Muriel,
      Le domaine public de l’Etat est inaliénable et imprescriptible. A ma connaissance, on ne peut revendiquer une prescription acquisitive.
      Le motif de la zone naturelle est indépendant à mon sens. A voir avec votre notaire ce qu’il en pense en fonction des caractéristiques propres à votre dossier.

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